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Neurones miroirs : Comment se met-on à la place des autres?



Cachée sous son lit en sanglots, elle tente de rejoindre les services d'urgences, mais la ligne est coupée. Vous regardez la scène, votre rythme cardiaque s'accélère. L'étranger monte tranquillement les marches une à une... Il agrippe sa jambe.

Vous êtes en sueur et pourtant vous êtes en sécurité, devant le plus grand cliché de film d'horreur. Comment arrive-t-on à se mettre dans la peau d'une autre personne au point où on semble vivre, à travers l'autre, la même situation? C'est la question à laquelle je vais tenter de répondre.


D'abord, je vous ramène 30 ans en arrière, en Italie. Des chercheurs étudient le cortex moteur des macaques (la région qui commande les mouvements) :

Lorsque le macaque prend la nourriture, des neurones déchargent pour que ses muscles puissent se contracter en sa direction. Ce n'est pas bien surprenant.


À la fin de l’expérience, une personne prend le reste de la nourriture par hasard.

Au grand étonnement des chercheurs, un groupe de neurones qui s'était activé pendant que le macaque agrippait la nourriture a aussi déchargé au moment où le chercheur l'a prise!


Il semble qu'un groupe de neurone s'active en fonction du geste de celui qu'il observe comme si le cerveau du singe faisait le miroir du cerveau de celui qui est en face de lui.

C’est à partir de ce moment que des recherches sur le sujet se sont multipliées afin de mieux comprendre leur fonctionnement chez le singe et pour savoir si le cerveau humain a, lui aussi, ce type de neurone.

Le singe

Les neurones miroirs ont beaucoup été étudiées dans l'aire prémoteur ventral (F5) du macaque puisque c'est le premier endroit où elles ont été repérées.

Avec le temps, ils ont découvert que ces neurones, présents dans plusieurs régions du cerveau, formaient plutôt un réseau neuronal complexe. D'ailleurs, ce réseau semble réagir spécifiquement à l'observation et à l'exécution des mouvements des mains et de la bouche.


Le macaque partage 93% de ses gènes avec l'humain ce qui nous rend très similaire, mais nous ne sommes pas identiques pour autant. Alors, les résultats obtenus chez le singe ne peuvent pas directement être attribués aux humains. Puisque les normes d'étude sont différentes chez l'humain et chez le singe, il est plus difficile d'investiguer de manière aussi précise les neurones miroirs chez l'humain.


L'humain

Pour identifier la manifestation de potentielles neurones miroirs chez l'humain, des chercheurs ont mesuré l'activité des neurones grâce à l'électroencéphalographie.

  • Électroencéphalographie : Méthode de mesure de l'activité de populations neuronales grâce à de petites électrodes que l'on pose sur la tête. Les tracés qui illustrent l'activité électrique du cerveau se nomme électroencéphalogramme.

On se sert de l'électroencéphalographie pour mesurer les rythmes dans le cerveau. Sans entrer dans les détails, l'activité électrique du cerveau est régie par différents rythmes. Donc, en les enregistrant, on obtient de l'information sur ce qui se passe dans le cerveau d'une personne. Ici, nous nous intéressons principalement au rythme mu. L'onde mu ressemble à ça :

Des recherches sur l'humain nous ont permis de découvrir que pendant qu'une personne fait, observe ou imagine un mouvement, la puissance de mu diminue ce qu'on appelle la suppression mu. On croit que les suppressions mu pourraient représenter l'activité du système de neurones miroirs. C'est donc en observant des suppressions mu que nous savons que les neurones miroirs sont actives.


Leurs fonctions

Les recherches actuelles ne permettent pas de savoir exactement à quoi servent les neurones miroirs. Par contre, les chercheurs se sont permis d'émettre certaines hypothèses sur les rôles qu'ils pourraient jouer. Il est possible que toutes, quelques-unes, ou aucune de ces fonctions soient réellement attribuables aux neurones miroirs.


Apprendre par imitation

Puisque, en observant une personne faire une action, notre cerveau réplique cette action en même temps, on pourrait en déduire que ces neurones sont impliqués dans l'apprentissage de ces comportements. Avoir déjà fait, d'une certaine manière, le geste dans notre tête nous aiderait à mieux répliquer le même comportement plus tard.


Apprendre à faire un dab

 

D'ailleurs, une recherche a permis de démontrer que cetaines régions cérébrales sont particulièrement actives pendant que l'on imite un comportement. Pour se faire, ils ont demandé aux participants de soit exécuter un mouvement avec la main, imiter un mouvement de main ou observer un mouvement de main. Une sous-secontion de l'aire de Broca, le cortex pariétal postérieur et l'opercule pariétal étaient plus activés lors de l'imitation que l'exécution et de l'observation.

Prédire les intentions des autres

Ces réseaux neuronaux pourrairent aussi nous permettre de prédire les prochains mouvements qu'une personne s'apprête à faire. Dans une étude, on a demandé aux participants de regarder des videos où on voit une personne qui soulève sa tasse de café. Le geste est identique dans les 3 vidéos, mais le contexte est différent :

  1. Quelqu'un qui prend son café plein sur une table propre (le participant peut donc prédire qu'elle lève son café pour le boire)

  2. Quelqu'un qui prend son café vide sur une table en désordre avec des embalages de nourriture vides (le participant peut donc prédire qu'elle veut le jeter)

  3. Quelqu'un qui prend son café sans contexte (le participant ne peut rien prédire)

Les imageries cérébrales des participants pendant qu'ils regardent les vidéos montre une plus grande activation de régions du système de neurones miroirs lorsqu'ils visionnent les deux premières versions de la vidéo comparativement à la troisième.


Ce serait la région temporo-pariétales, le cortex préfrontal médian et les pôles temporaux qui permettraient de mieux prédire l'action qu'on observe chez quelqu'un. En reproduisant les actions dans ces régions de notre cerveau, ça permettrait de mieux deviner ce qu'une personne s'apprête à faire.

Communiquer

On croit que des neurones miroirs sont présent dans une sous-section de l'aire de Broca (responsable de la production de language) :le gyrus frontal inférieur pars opercularis. En effet, ces neurones s'activent lors de l'imitation, entre autre, de la bouche et de la langue. Donc, on peut croire que cette région est impliquée dans le développement du language.


Aussi, on croit que les neurones miroirs donnent un support supplémentaire pour mieux comprendre ce qu'on nous dit. Pour ce faire, on répliquerait les mouvements de la bouche de notre interlocuteur dans notre cerveau comme si nous étions nous même en train de prononcer les mêmes paroles.


Empathie

Dans une étude, on fait sentir des mauvaises odeurs aux participants en portant attention à leur imagerie cérébrale. On observe que leur insula s'active lorsqu'ils ressentent du dégout.

Puis, on leur montre des images de personne qui ressentent du dégout. On observe alors que les mêmes neurones s'activent. Donc, certains neurones s'activent autant lorsqu'on se sent dégouté que lorsqu'on regarde une personne qui l'est. Une autre étude similaire a obtenu les mêmes résultats en provoquant une petite douleur chez les participants qui amène une activité similaire dans l'insula que lorsqu'ils voient une autre personne ressentir de la douleur.

En bref, les études actuelles permettent de savoir que les neurones miroirs répondent aux mouvements de la bouche et des mains d'autres personnes. Ces gestes doivent être motivés par une intention pour qu'ils activent ce réseau. Ces neurones sont distribués dans plusieurs régions du cerveau leur donnant une fonction particulière selon la région nous permettant de prédire les actions des autres, se mettre à leur place, mieux les comprendre, ect. Les humains ne sont pas les seuls qui semblent avoir des neurones miroirs : On en a trouvé chez d'autres primates, des oiseaux et même les chez les dauphins.


Il reste encore beaucoup de recherche à faire pour démystifier les neurones miroirs et mieux comprendre leur impact sur nos cognitions et le développement de psychopathologies. Contrairement aux résultats obtenus chez les macaques, les résultats actuels chez les humains ne font pas l'unanimité au sein de la communauté scientifique. Mais que ces neurones aient ou non toutes les caractéristiques que nous leur attribuons chez les humains, je considère que c'est tout de même très impressionnant de savoir que nous pourrions avoir des des neurones qui font le miroir de nos congénères.

 

Dorénavent, je ne publierai plus sur ce site. Pour voir de nouveaux articles, aller voir mon nouveau site internet en appuyant sur le cerveau!




 

Sources


Goldstein, E. B. (2018). Cognitive Psychology (5e éd.). Cengage.


Janilière, H. (18 mai 2017). Pourquoi bailler est-il contagieux?. Sciences et Avenir. https://www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/pourquoi-bailler-est-il-contagieux_100834


Jarder, J. (12 avril 2007). Le macaque partage 93% de ses gènes avec l'homme. Figaro. https://www.lefigaro.fr/sciences/2007/04/13/01008-20070413ARTFIG90017-le_macaque_partage_de_ses_genes_avec_l_homme.php


Jeon, H., & Lee, S. H. (2018). From Neurons to Social Beings: Short Review of the Mirror Neuron System Research and Its Socio-Psychological and Psychiatric Implications.Clinical psychopharmacology and neuroscience : the official scientific journal of the Korean College of Neuropsychopharmacology,16(1), 18–31. https://doi.org/10.9758/cpn.2018.16.1.18


Kilner, J. M., & Lemon, R. N. (2013). What we know currently about mirror neurons.Current biology : CB,23(23), R1057–R1062. https://doi.org/10.1016/j.cub.2013.10.051


(s.d.) Des neurones miroirs à la base de la communication?. Le cerveau à tous les niveaux. https://lecerveau.mcgill.ca/flash/a/a_10/a_10_cl/a_10_cl_lan/a_10_cl_lan.html

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